Ils croisent leurs réseaux et associent leurs compétences. Puis ils secouent tout en douceur les codes de la filière pour faire changer le regard sur l’ail en France.
Aujourd’hui, des grands restaurants et des chefs renommés découvrent des saveurs encore inconnues de l’ail. Cela a donc été possible grâce à l’ambition d’un couple qui souhaite élargir encore plus le cercle des initiés. Un couple qui souhaite aussi rendre à l’ail ses lettres de noblesse.
L’histoire de la Maison Boutarin, c’est une histoire de terre, de passion et d’engagement.
Une histoire de famille aussi, unie comme des gousses chaudement resserrées dans une même tête d’ail.
Fanny et Stéphane sont les deux versants de la Maison Boutarin. Etant mariés dans la vie et habitant dans la Drôme sur l’exploitation agricole, ils ont allié leurs savoir-faire au service d’une même envie. Ils ont alors voulu valoriser l’ail et faire redécouvrir ses saveurs multiples. Puisque l’ail est un produit qui, mine de rien, abrite encore bien des surprises.
L’ail : une histoire de Drôme et de famille
Qui dit Drôme dit ail, et inversement. La Drôme produit de l’ail depuis bien longtemps. Le climat lui est favorable et les agriculteurs drômois s’attachent à sa qualité, à son goût et au renouvellement de ses variétés. C’est là que Stéphane et Fanny Boutarin sont nés pas très loin l’un de l’autre. Dans les mêmes cercles et dans les mêmes cours de récré depuis tout petits, Fanny et Stéphane ont commencé par être de bons copains d’enfance, trimballés dans des soirées, ados, par leurs frères aînés. L’été, Fanny récolte l’ail, un traditionnel « petit boulot » qu’elle effectue dans les champs de son grand-père et de son oncle. Stéphane, lui, le côtoie sur les terres de son père, agriculteur. Mais ni l’un ni l’autre ne se destine à la culture de l’ail.
L’art de parler de l’ail et de tendre l’oreille au consommateur
Épaulant son père sur ses terres, Stéphane découvre alors le métier. Parallèlement, il fait des animations en grande surface. Ainsi, il y présente l’ail au nom d’un groupement de producteurs, le GIE Ail Drômois. Son intérêt se porte de plus en plus sur la défense de l’ail drômois et français. Il s’aperçoit aussi qu’il aime parler de l’ail. Aussi, il aime être au contact des clients, ceux qui mangent de l’ail. Qu’en disent-ils ? « Mange de l’ail, tu ne seras jamais malade ! »… Les vertus et tout un imaginaire lié à l’ail que Stéphane observe. L’ail c’est un peu la cuisine de nos grand-mères. Stéphane fait le constat que l’ail est devenu comme le sel. On l’utilise par habitude, on ne le questionne plus. Il est choisi à l’œil, si la tresse est belle. Mais en réalité, nous oublions qu’il existe une multitude de variétés et de goûts.
Apprendre et entreprendre
Pendant ce temps, Fanny fait ses études. Elle passe une maîtrise en littérature anglaise en Angleterre. Elle entre ensuite au Centre d’étude de la langue de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Valence. Elle y côtoie alors le monde de l’entreprise et s’y intéresse de près. Puis, elle décide de s’investir dans le jumelage. Cette activité l’amène donc à se plonger dans l’univers des financements et des fonds européens. Par la suite, elle devient finalement spécialiste de son domaine et se forme à Sciences Po Lille. Plus tard, Fanny devient maman de trois enfants et intègre un tout nouveau poste créé à la CCI : chargée de mission Europe. Elle y reste dix ans. Après cela, elle enchaîne sur un poste de direction du service Industrie, toujours à la CCI de Valence.
La croisée des chemins
En 2001, Stéphane s’installe sur l’exploitation familiale. Il est devenu président de l’association des producteurs d’ail de la Drôme. Il mène alors le difficile combat de la concurrence des marchés chinois ou espagnols. Il n’hésite pas à rejoindre Bruxelles pour défendre l’ail français et ses producteurs. L’ail est l’une des rares filières encore tenue entièrement par des agriculteurs… Ils déploient tous les deux beaucoup d’énergie dans leur travail. Alors pourquoi ne pas les faire converger, travailler en complémentarité ? Fanny quitte alors son emploi, bien décidée à créer quelque chose aux côtés de Stéphane. Et ce « quelque chose ensemble » viendra de l’île de Whight, en Angleterre. C’est sur cette île que le couple s’est rendu pour découvrir le Garlic Festival. Un festival incroyable où l’on célèbre l’ail comme à Woodstock. Tout y est parfumé à l’ail : saucisses, bières, chutneys. Cet événement rassemble près de 25 000 personnes par an.
Noir comme de l’ail
Lors de ce festival, ils rencontrent l’ail noir. Cette pépite tendre et sucrée qu’ils font goûter à des grands chefs et qui deviendra l’emblème de leur entreprise : la Maison Boutarin. Ils associent leurs savoir-faire et secouent tout en douceur les codes de la filière pour faire changer le regard sur l’ail en France.
Toute la famille participe alors à l’invention des recettes. Surtout, elle teste différents temps de séchage afin d’obtenir un ail noir savoureux et fondant en bouche. Les chefs de grands restaurants de la région mais aussi de la France découvrent alors des saveurs encore inconnues de l’ail. L’ambition d’un couple a permis d’élargir encore plus le cercle des initiés et aussi de rendre à l’ail ses lettres de noblesse.